Il y a eu "Les mystères de Paris", puis "Les nouveaux mystères de Paris" de Léo Malet. Zola a écrit "Les mystères de Marseille". Est-ce qu'avec "L'énigme de la Blancarde" sous-titré "Les nouveaux mystères de Marseille" vous avez eu d'emblée l'idée d'une série ?
Pas du tout. Le sous-titre Les nouveaux mystères de Marseille est, évidemment, un clin d’œil hommage au premier roman d’Emile Zola, qui lui-même faisait référence aux Mystères de Paris d’Eugène Sue (en moins bon). Je pensais en rester là. C’est Laurent Laffont, directeur littéraire chez Lattès, qui m’a suggéré l’idée d’une “suite romanesque”. Ensemble nous en avons établi "le cahier des charges". A partir d’affaires réelles, plus ou moins adaptées, on retrouverait des personnages récurrents – les héros de L’énigme de La Blancarde : Raoul le reporter, Cécile sa fiancée devenue sa femme, l’oncle commissaire, etc… auxquels viendraient s’agréger des “seconds rôles” propres à chaque histoire. Et chaque fois, un nouveau quartier de Marseille servirait de décor. J'en suis à quatre volumes parus. le cinquième est écrit. Il s'appellera probablement Le fantôme de la rue Saint-Jacques et aura pour cadre le quartier bourgeois de la Préfecture à Marseille ainsi que le village de Saint-Julien. Il devrait paraître en novembre 2006. Après ? On verra. Je m’arrêterai de moi-même quand je n’éprouverai plus de plaisir. C’est le moteur principal. A partager avec les lecteurs. Mais je ne me vois pas jouer les Léo Malet et aller jusqu’à 20 volumes.
Avez-vous déjà recensé d'autres énigmes susceptibles de conduire à des romans ? Car si vous suivez le même postulat vous partez de cas non élucidés. Y en a-t-il beaucoup ?
La “ matière ” comme vous dites, existe. Au besoin on l’importe d’autres périodes et on l’adapte. J’ai recensé plusieurs histoires qui pourraient convenir. Dans le second volume, par exemple, j’ai mélangé deux affaires qui ont eu lieu dans des endroits différents et n’avaient pas de rapport entre elles. Et puis, ce que je n’ai pas, je l’imagine.
J’aime bien cette ambiance de la Belle Epoque, parce que c’est celle des grands feuilletonistes que j’admire et envie (Ponson du Terrail, Gaston Leroux, Souvestres et Allain, Maurice Leblanc) et parce que la Belle Epoque marseillaise n’a pas encore été exploitée. Je défriche.
Parlons un peu roman policier. Le "polar" c'est quoi pour vous ?
Le polar, pour moi, c’est un genre majeur, parce qu’on peut tout faire passer à travers une histoire policière : critique sociale, politique, économique et parce que les règles imposées par le genre vous obligent à la rigueur. On ne traîne pas en route. J’ai horreur des temps morts romanesques. Le tempo de l’histoire est mon obsession. J’ai toujours peur de m’emmerder en cours de route. Et d’emmerder les autres.
Quels sont vos auteurs de polars préférés ?
En vrac et au hasard : Gaston Leroux, Dashiell Hammet, Chase, Simenon, Andrea Camilleri, Patricia Highsmith, Horace Mc Coy, Tony Hillerman, P.D. James, Ruth Rendell .
Avez-vous épuisé les faits divers Marseillais et est-ce que la chronique "Ca c'est passé à Marseille" sera reprise un jour dans La Provence ?
La chronique Ça s’est passé à Marseille ne sera pas reprise dans La Provence. D’abord parce que je m’y opposerais, ensuite parce qu’on ne risque pas de me le demander
Quel genre de romans policiers préférez-vous ? Le roman noir ? Le suspens ? Le "polar" historique ? L'énigme classique ?
J’aime tous les genres du polar. A condition qu’on sache m’embarquer, je marche. je suis très bon public, quand c’est bien fait. Je déplore que trop de médiocres culottés – s’engouffrant dans une mode temporaire comme toutes les modes - occupent trop de place dans un genre qui demande outre le talent, une discipline d’enfer.
Envisagez-vous d'écrire des "polars" inspirés de faits plus récents ?
Je n’envisage pas pour l’instant d’écrire sur des faits divers plus récents, car la plupart ont été déjà exploités.
Combien de temps pour écrire “L’énigme de la Blancarde” ?
“ L’énigme ” m’a pris deux mois pour aller jusqu’au mot fin. J’écris vite, mais après une gestation plus ou moins longue. Mon record personnel c’est 27 jours (La cathédrale engloutie). Encore faut-il s’entendre. Je recorrige et relis beaucoup pour flinguer les adverbes et les adjectifs en plein vol.
Comment écrivez-vous ? Etablissez-vous un plan précis que vous suivez fidèlement, ou bien démarrez-vous avec une idée plus ou moins précise et ensuite vous découvrez les péripéties au fur et à mesure ?
Je démarre avec une vague idée. Parce que si je sais trop où je vais, ça me fige. J’adore me faire des surprises en cours de route.
Et jamais de panne ? Ca m'épate un peu ces auteurs capables de pondre des pages et des pages, comme G.J. Arnaud... Je me souviens avoir entendu F. Dard dire que tous les matins il se mettait à sa machine et écrivait jusqu'à midi. Ou Pierre Magnan qui travaillait jusqu'à 5 h. comme un fonctionnaire ! alors que, naïvement, je croyais que tout dépendait de l'inspiration, tel jour 1 page, tel jour rien, tel jour c'est la forme : 10 pages, etc.
C'est un métier d'artisan. Il faut être sur l'établi et ça finit par venir. Le journalisme m'a été d'un grand secours, où il faut pondre son texte, même si on n'en a pas envie pour telle heure et avec tant de lignes. Qu'on ait mal à la tête, que bobonne vienne de vous plaquer pour un maître-nageur, ou que les pieds et paquets de midi ne passent pas bien.
C'est bon, moins bon, ou franchement mauvais, mais je n'ai jamais connu la panne. Je crois que c'est un mot inconnu dans le journalisme de quotidien. Et ça aide quand on passe aux choses sérieuses. Dard était un ancien journaliste. Quant à Magnan, c'est un paysan sur son araire.
Reste le cas G.J. Arnaud. A mon avis, lui, il possède une fonction endocrine supplémentaire qui sécrète de l'encre d'imprimerie. .
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